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Les événements de l’écosystème de l’innovation vaudoise : le retour de la vengeance présentielle et des plateaux de fromages

Ça faisait longtemps. Il y a eu mes premières vingt minutes dans un bar de nuit, un des premiers soirs après la mise en place du scan du certificat COVID ici en Suisse. C’était chelou, j’ai eu besoin d’aller boire ma bière dehors, pas à l’aise.

Cela m’a aidé ces deux dernières semaines à mieux gérer la bizarrerie de la reprise d’événements locaux physiques à plusieurs dizaines voire centaines de personnes, avec de longs moments de conférence ou de partage de buffets sans aucun masque à l’horizon (puisque c’est le protocole courant ici et dans beaucoup d’autres pays : tu montres le QR code de ton certificat de vaccination complète / guérison / test récent et une pièce d’identité, et tu peux te balader dans l’événement sans masque, “comme avant”). Après des mois à porter un FFP2 plusieurs heures par jour, il y a un temps d’adaptation.

Par contre, toujours pas de vaccin luttant contre les vestons gris mal taillés et favorisant l’émergence de plus de hoodies colorés aux design qui claquent, mais j’ai confiance en la science.

To be a startup or not to be, kein Problem

C’est une conversation interne chez Kargobike depuis plusieurs mois: ça nous fait toujours marrer quand on nous présente comme une “startup”, ou au contraire quand on nous snobe dès qu’on ne nous présente pas ainsi.

Pour briser le suspense: nous n’en sommes pas une. Un modèle d’affaires qui a 5000 ans passés (invention de la roue, vers -3500 en Mésopotamie, autant te dire que ça fait un moment qu’on sait combien ça coûte et combien ça rapporte de bouger des gros trucs), une croissance du chiffre d’affaires au mieux linéaire, et par-dessus le marché (!), une transition vers la coopérative rendant impossible la spéculation: investir chez nous dans l’avenir (Kargobike est une aventure auto-financée à ce jour), c’est co-construire des communs en lien avec la fabrique de la ville (des systèmes de mobilité durable), pas espérer une bascule sur une revente ou une introduction en bourse.

C’est toujours rigolo de me présenter comme ouvrier pédaleur et chef d’entreprise, co-fondateur d’une PME locale du transport, par contre.

Bullshit fatigue, et raisons de continuer à assister et soutenir

Il y a des choses qui ne me manquaient vraiment pas dans l’entre-soi événementiel local, et d’autres qu’il est très plaisant de retrouver. Comme j’ai souvent été du côté “organisation” de la barrière, voici quelques observations pratiques qui sautent aux yeux après tant de temps sans rassemblements physiques.

D’abord, la technique de pitch. Surtout si vous tenez un programme d’accélération. À part dans de très rares cas, les spin-offs d’une grande école tech ont rarement une équipe incroyablement remarquable. Ne leur faites pas gâcher un temps précieux sur scène à dire des banalités sur la diversité incroyable de leur équipe (tous ingé du même labo) ou combien iels sont douéexs et motivéexs (on espère). Faites les un peu bosser sur la démonstration d’une traction, ou de comment iels vont faire un peu de thunes avec leur super concept. Ou dire explicitement de quoi iels ont besoin. Ou expliciter une promesse de valeur claire et concise (les diapo où, après avoir lu quatre phrases de 200 caractères minuscules chacune dans une liste à puces, on ne comprend toujours pas ce que ces gens font concrètement, personne ne les relit ou bien?).

“L’innovation vaudoise” est un petit monde, que je pratique depuis bientôt 10 ans, avec trois casquettes d’activités successives très distinctes (innovation médias, tiers-lieux et bio-hacking, et maintenant, cyclologistique et mobilité). Il y a celles et ceux contents de me recroiser, et c’est toujours rigolo d’être présenté par ce que je faisais avant, et de surprendre avec mon activité actuelle. D’ailleurs, il faut que j’écrive plus précisément le lien entre tout ça, il y en a un. Ce qui permet, à force, de commencer à croiser les personnes pertinentes plus simplement, d’être présenté par des tiers de confiance plus rapidement. Rapprochez-vous des directions de l’économie et des personnes en charge des institutions de promotion de l’innovation, des clusters industriels, et cherchez, s’ils existent, les groupes de travail liés à votre domaine (rejoignez, favorisez, contribuez à ce genre de choses). Leur job est de rencontrer et cartographier, donc facilitez-leur la vie et soyez remarquables et facilement mémorisables (cf. supra, bossez votre pitch). Il y en a peu dans la région, mais la remarque s’applique aussi aux journalistes spécialiséexs.

Un petit point “profils neuroatypiques et majorité extravertie”, et “micro-travailler depuis n’importe où”: on ne voit pas encore assez systématiquement d’espaces prévus dans les événements pour pouvoir s’isoler et se recharger au calme un moment (pour les personnes qui fonctionnent ainsi), voire recharger un appareil électronique et envoyer quelques emails / prendre un appel rapidement dans de bonnes conditions. Si vous arrivez à prévoir un espace fumeurs, prévoyez un espace bosseurs. Dans le doute, il y a probablement des spécialistes locaux capables de vous aider à aménager un coin “pop-up coworking” simple et efficace dans votre événement.

La curation avec les pieds existe: si vous ne vous sentez pas à votre place dans un événement, allez prendre l’air ou explorez une autre zone du lieu un petit moment. Ou partez, tout simplement, si vraiment l’ambiance ne vous convient pas. Inutile de vous acharner si ça ne joue pas.

Si comme moi vous êtes plutôt du côté gauchiste de la Force, créez le contraste, favorisez le lien. Fréquentez les chambres de commerce, les événements marqués très “économie et patronat”. Déjà, les gens de droite sont aussi vos clients (et il ne vous aura pas échappé qu’iels sont un peu majoritaires par ici), et porter des idées un peu différentes et minoritaires ne peut pas faire de mal à ces institutions. Pas mal de choses se passant à l’interstice, il y a toujours un bonus pour celles et ceux capables de faire des ponts entre groupes ne se parlant a priori pas. À quelqu’un me demandant récemment ce que je faisais dans “le temple du capitalisme”, j’ai répondu que je venais simplement faire des affaires. Ça l’a détendu.

Les personnes élues ou représentant une institution qui font les paroles introductives ou la présentation de lancement, par pitié, faites un effort. Tous les gens présents ont un agenda et bossent dur, et pourtant, iels restent quelques heures. En vous enfuyant juste après votre passage sur scène, 20 minutes montre en main café et bonjour aux organisatrices compris merci bisous, vous échouez dans au moins trois domaines:

  1. vous manquez de respect aux gens dont l’impôt paye votre salaire. Dans un contexte plutôt peu favorable à l’État dans la plupart de ces communautés, vous vous tirez une balle dans le pied en snobant ainsi les gens. Envoyer le signal que votre message est le plus/seul important est par ailleurs d’une cruelle incompétence, surtout dans un cadre où vous venez par exemple demander de l’aide et de la collaboration sur un sujet que la société civile maîtrise mieux que vous, ou présenter un bilan mitigé,
  2. la partie la plus intéressante de l’information s’échange en général pendant la discussion, après votre départ. Vous vous privez ainsi de précieux signaux faibles pour améliorer plus vite vos politiques. Votre communication descendante apporte peu de valeur en général, alors que la communauté de pratique présente a beaucoup à vous apprendre ou à vous demander,
  3. vous empêchez aux gens en ayant besoin, ou dont vous avez besoin, de venir vous parler rapidement et directement (le but premier d’un événement physique, donc). C’est ensuite une purge infinie de vous recontacter, quand vous répondez à vos emails. D’autant qu’avec un tel signal d’intelligence émotionnelle envoyé, ça ne donne pas exactement envie de bosser avec vous.

Pour les entrepreneurs ou les gens qui ont quelque chose à vendre, résistez à l’envie de sauter sur la Conseillère d’État ou le Municipal présent. Le risque de mettre les gens mal à l’aise car pas préparés sur un sujet précis (le vôtre) est grand, d’une part. C’est avec leurs cabinets et les administrations qu’il faut préparer le terrain, d’autre part. Du coup, côté organisation, si c’est bon pour l’égo et les sponsors d’avoir ce type d’intervenants sur scène, n’oubliez pas d’inviter aussi les fonctionnaires pertinentexs sur le sujet (bien en amont), et de vous assurer de leur présence un bon moment sur place, pour que l’apéro soit plus productif pour tout le monde.

En parlant d’apéro. Nous sommes dans un canton agricole qui aime mettre en valeur les produits locaux, donc en général le buffet est bien garni, le fromage et le vin blanc coulent à flots. Restez raisonnables, et tapez aussi dans le jus de fruits – eau gazeuse, vous resterez plus longtemps en état de prospecter et de ne pas vous ridiculiser, surtout après presque deux ans sans entraînement. C’est un petit milieu, ne gâchez pas les occasions de faire bonne impression bêtement.

Enfin, ne vous rendez jamais à un événement professionnel si:

  1. vous êtes de mauvaise humeur ou pas en forme: ça ne crée pas un cadre favorable à vous faire remarquer ou à être disponible pour les autres,
  2. vous n’avez pas une préparation minimale. Par exemple, la version “20 secondes un verre à la main dans un lieu bruyant” de votre pitch. Une phrase qui suscite la curiosité, et incite vos interlocutrices à poser des questions, plutôt que quelque chose de complet. Pour Kargobike, en ce moment j’utilise “On bouge jusqu’à 300 kilos sur de gros vélos”. C’est la partie qui se retient facilement. Je parle de nos activités de conseil ou de gestion de flottes de vélos partagés plus tard dans la conversation si ça se présente. Si j’identifie que quelqu’un peut concrètement nous aider, je l’explique rapidement sans détour. De même, si je sens une synergie potentielle, je n’hésite pas à demander aux autres si et comment nous pouvons les aider. Stickers ou cartes de visite, voire tee-shirts et autre vêtements personnalisés à votre marque si c’est votre truc (il m’arrive de me pointer en jersey, veste et gapette de vélo quand je veux me faire remarquer, mais n’en faites pas trop dans un truc que vous sentez très conservateur), en tout cas une façon simple de vous retrouver, prête à partager,
  3. vous n’avez pas prévu un moment le lendemain pour le suivi des gens rencontrés. Emails, contacts LinkedIn personnalisés rappelant le contexte (certaines personnes enchaînent les événements, c’est utile de rappeler où vous vous êtes croiséexs, voire de quoi vous avez parlé, en quelques phrases, pas un roman), et surtout, envoi des informations ou documents promis à des prospects potentiels, et tenue de votre CRM (logiciel de suivi des prospects et clients) interne.

D’ailleurs je vous laisse, je dois écrire à mes rencontres d’hier.

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Coworking Gigolette influente Parfois je me pose des questions plus ou moins à la con

Ce qui change dans ta vie avec le coworking

Après cinq ans de travail acharné de documentation personnelle plus ou moins ordonnée, de rencontres et de pratiques du coworking, il est temps de procéder à une restitution. Premier d’une série (ou pas), ce billet va permettre de poser quelques traces dans un coin propre, d’où je viens et où j’espère me rendre dans cette communauté européenne et mondiale. Et surtout, détailler quel est son impact sur les écosystèmes de l’innovation et ceux qui font plus que prononcer ces buzz words, qui les vivent.

A chaque fois qu’on me demande d’expliquer ce qu’est le coworking pour moi, je repense à cette photo.

Laptop Superstar, Coworking Europe Conference, Barcelona, nov. 2013 — Curtesy of Stefano Borghi www.stefanoborghi.com
Laptop Superstar, Coworking Europe Conference, Barcelona, nov. 2013 — Curtesy of Stefano Borghi www.stefanoborghi.com

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Parfois je me pose des questions plus ou moins à la con

Back to School: Coursera.org

C’est la rentrée paraît-il, alors allons y sans complexe : une introduction en Computer Science à Stanford, un renforcement en Corporate Finance grâce à un prof prestigieux de Wharton, et pourquoi pas quelques éléments sur l’état de la science et des technologies dans la société chinoise ?

Back to school

Bon évidemment, vu que je suis en train de me lancer en tant que consultant indépendant, ça sera peut-être bien pour l’an prochain, tout ça non ?

FAUX.

Aucun rapport avec Pratchett

Bien au-delà du fantasme, il ne m’a fallu qu’une heure et zéro euros francs pour m’inscrire à ces modules et à d’autres et renseigner mon profil sur Coursera.org. Ces cours sont évidemment un peu particuliers. Ils participent à un mouvement en plein essor répondant au doux acronyme britton de MOOC, pour Massive Open Online Course. La plateforme que j’ai retenu, Coursera donc, a beaucoup fait parlé d’elle en 2012 pour avoir déjà conclu des partenariats avec plus d’une trentaine d’universités prestigieuses.
Même l’EPFL est là, et son Président a récemment annoncé qu’il prenait une année sabbatique, notamment pour observer les enjeux stratégiques liés à ces nouveaux modes de dissémination qualifiée du savoir que sont les MOOCs.

Un objectif double : entretenir mes neurones et progresser

Parmi les cours où je suis inscrit, trois me semblent particulièrement importants, par la qualité des matériaux ainsi mis à disposition, ou par la difficulté de trouver (à prix et horaires abordables) localement des formations au niveau académique suffisant. Restons calmes les Helvètes, je n’ai mon permis B que depuis un mois. Rangez ces fusils d’assault (oui, le Gripen au fond, aussi).

Corporate Finance, par Franklin Allen, Wharton/Penn

C’est un tweet qui m’a mis la puce à l’oreille :

Et effectivement, le monsieur semble très intéressant. Il met un tout petit peu la pression dans la vidéo de présentation en rappelant le public habituel de ce cours (MBA – Finance 6.11, tout d’même), mais ça va, on gère :

La date du cours n’est pas encore connue, mais pour l’ancien étudiant en Microéconomie à Toulouse que je suis, il est particulièrement bon de renouer avec la sensation que les gens en question ne sont pas là pour tricoter, et que ça va mouliner sévère de la yaourtière, si j’puis dire.

Mes deux premiers cours commençant fin janvier : Innovation, et Réseaux sociaux (pour de vrai)

A force de traîner avec demander des conseils à des entrepreneurs bruxellois ou de boire des bières avec un binôme statisticien-historien spécialisé en Digital Humanities, il fallait s’y attendre : la lente descente, la compromission ; j’ai BESOIN de retoucher même de loin à la théorie solidement documentée et aux racines profondes que confère l’expérience de terrain. Je sens que parler dans ce contexte de réseaux au sens noble, scientifique, du terme et de processus d’innovation dans l’entreprise va me stimuler bien comme il faut.

Avoir des idées certes, mais savoir d’où elles viennent, en somme.

La poire pour la soif

Pour moi qui peine dès qu’il doit passer en éditeur HTML pour ne serait-ce que poster ici, le meilleur était encore à venir.
Je n’ai jamais fait l’effort d’apprendre à coder. J’ai de vagues notions d’algorithmique, je sais comment se débrouiller d’un forum phpBB à un WordPress chichement agencé, mais ça s’arrête très vite là.
Alors je dois avouer qu’au moment de cliquer sur “Sign Up” pour m’inscrire à Computer Science 101, Stanford après avoir vu cette vidéo, j’étais tout fou.

De manière pratique, je me suis organisé pour que la charge de travail prévue ne dépasse pas 10-12h par semaine (certains mois on descend même à 5), en fonction des cours se chevauchant. Ça me semble tout à fait raisonnable dans mon cas particulier.

Un dernier détail, et non des moindres : à de rares exceptions près, les cours en question donnent tous droit en cas de réussite aux examens finaux à un certificat signé de l’instructeur. On est encore loin de la conversion en ECTS, mais tout d’même.

Et bien sûr, si je vous ai donné envie de me rejoindre dans une classe ou l’autre, faites moi signe ; on montera un groupe d’étude.